La zone d’intérêt est un film dramatique britannico-polono-américain écrit et réalisé par Jonathan Glazer. Il est sorti au cinéma en 2023. Et c’est une adaptation du livre du même nom de Martin Amis.
Après le film Vivre où j’ai pleuré comme une madeleine, c’est armée d’un paquet de mouchoirs que je me suis rendue au cinéma pour voir le film La zone d’intérêt proposé dans le cadre du ciné-club Psy organisé par l’APPQ (Association des Psychothérapeutes Psychanalytiques du Québec).

La zone d’intérêt – Résumé
Le commandant d’Auschwitz Rudolf Höss et son épouse Hedwig réalisent sur un terrain directement adjacent au mur du camp leur vision d’une vie de rêve avec une famille nombreuse, une maison et un grand jardin. Cependant, lorsque Rudolf doit être muté à Oranienburg, leur petite vie idéale menace de s’effondrer et il cache l’information à son épouse. Quand Hedwig l’apprend, elle refuse de quitter sa maison de rêve.
Thématiques abordées
Ciné-club Psy de l’APPQ
Comme évoqué dans l’introduction de cet article, j’ai vu ce film dans le cadre du ciné-club Psy organisé par l’APPQ (Association des Psychothérapeutes Psychanalytiques du Québec) au cinéma du Parc. J’adore y aller. J’y découvre toujours de très beaux films qui me sont inconnus et les conversations post-séances sont toujours extrêmement intéressantes.
La zone d’intérêt – Mon avis
Un oasis dans l’enfer d’Auschwitz
- C’est l’histoire d’un commandant d’Auschwitz Rudolf Höss et de son épouse Hedwig qui vivent dans une charmante maison à coté du camp de concentration d’Auschwitz. La vie est idyllique pour le couple. Monsieur a un travail, des responsabilités et de la reconnaissance. Sa femme profite de la posture de son mari pour avoir accès à de jolies vêtements et bijoux qui appartenaient à des juifs. Toute la famille profite du beau jardin où y pousse fleurs et légumes à coté d’une piscine. Madame aime jardiner. Elle possède même une serre. Elle a du personnel de maison. Les placards débordent de nourriture. L’opulence en temps de guerre. Un véritable oasis dans l’enfer d’Auschwitz.
- Quand le commandant doit être muté, sa femme refuse de quitter petit espace de paradis et sa vie privilégiée pour le bien être de la famille…
La dualité, le bien contre le mal
- Le film enferme son public dans une dualité morale constante entre le bien et le mal. Au premier plan visuel et auditif la vie parfaite de cette famille : les anniversaires, les papotages entre filles, les cadeaux, les repas de famille, les sessions de pêche avec le paternel, les couleurs vives des gâteaux et des fleurs, etc. Au second plan auditif et visuel, il y a les cris, les coups de feu, le bruit des trains, le noir, le gris et les fumées dans le ciel qui viennent des fours crématoires.
- Regardez bien l’affiche du film, la même dualité est représentée : vie au premier plan, la noirceur au second plan.
- Dualité que l’on retrouve aussi chez les personnages :
- Le père est un bon travailleur. Il est productif. Il est reconnu et apprécié. Il adore les animaux. Mais c’est un SS qui participe activement à des horreurs au quotidien.
- La mère est une bonne mère. Supportante et aimante. Mais elle peut crier et menacer de mort ses employés de maison qui sont des prisonniers.
- L’aîné est curieux et admiratif. Il veut faire comme son père. Mais il maltraite son petit frère.
- La fille semble montrer que tout va bien le jour. Mais la nuit le traumatise de vivre dans cet enfer remonte et son somnambulisme lui fait vivre des aventures dignent d’une résistante.
Les traumatismes
- Les parents sont bienveillants avec leurs enfants, mais évoluer dans ce coin de paradis en tentant d’ignorer l’horreur qui les entoure impacte le développement des enfants :
- L’aîné traumatise son petit frère, il semble avoir développé de l’agressivité.
- Le petit frère semble être un enfant très sensible.
- La petite fille n’a que son somnambulisme pour s’évader de cette maison ou telle une résistante, en cachette, elle va donner à manger à ceux qui vivent de l’autre côté du jardin.
Un film sans émotion?
- Après avoir vu un film, j’aime aller voir les mauvais commentaires sur internet pour comprendre ce que l’on peut reprocher au film et ce qui m’a peut être échappé. J’ai vu des commentaires qualifiant le film de : “ennuyant”, “sans émotion”, “soporifique”, “film à fuir”, “rythme lent”, etc. Et je suis plutôt d’accord avec les commentaires ! J’avoue même avoir baillé à plusieurs reprises.
- C’est un film plutôt contemplatif dans lequel il y a très peu d’actions, le rythme est lent et les séquences d’une banale vie de famille se sont enchainées sans jamais provoquer la moindre émotion en moi. Finalement, je n’ai pas utilisé un seul mouchoir !
- J’étais un peu perplexe à la fin de la séance de voir que des gens avaient été émus là où moi j’étais restée émotionnellement neutre. Et puis finalement, je me suis rendue compte que contre mon gré, le film m’avait positionné du côté de la famille de SS. Mes yeux et mes oreilles voyaient et entendaient l’horreur au second plan, mais mon attention était principalement attirée par ce que vivait les personnages principaux au premier plan. Comme les personnages, moi aussi j’ai entendu l’horreur, mais n’ai-je vu que le beau? Je savais que c’était horrible ce qui se passait à côté, mais n’ai-je vu que ce qui m’arrangeait?
Comment expliquer l’inhumanité?
- Lors de la session de questions après le film la question a été posée : comment des gens ont-ils pu participer à ses crimes haineux alors qu’au fond ils devaient bien savoir que c’était immoral? C’est totalement incompréhensible.
- D’après moi, c’est difficile de juger les personnages et de répondre à cette question complexe. Je pense que nous sommes tous des Rudolf et Hedwig. On n’a pas la main sur la gâchette. Mais indirectement, nous sommes tous les acteurs d’un système qui tue encore aujourd’hui quelque part dans le monde. Mais nous restons passifs par peur de perdre nos privilèges, par anxiété, par manque d’empathie, parce que l’on ne sait pas quoi faire, parce que les horreurs d’aujourd’hui sont encore loin de chez nous (mais pour combien de temps encore?).
- Bref, un film lent, à voir et à méditer !
Ma note
Vivement le prochain ciné-club Psy de l’APPQ pour y voir Undying love.